MAUDITS IRLANDAIS ! (1)

Publié le par François-Xavier Gaëtan Gelin

Qu'il soit clair, dans ce qui suit, que je ne me préoccupe pas de porter un jugement sur le vote des électeurs irlandais, consultés le 12 juin dernier par référendum sur le nouveau traité européen.


Non, ce qui m'intéresse ici, c'est, comme toujours, d'examiner les faits à la lumière du bon sens, de la raison, de la logique, de la cohérence.
Le fait que personne ne peut contester, c'est que les Irlandais ont rejeté, clairement, à près de 54% des suffrages, le projet qui leur était soumis.
Comme souvent, des sondages, curieusement, donnèrent longtemps le "oui" vainqueur, avant de laisser entendre que le match serait "serré". Manipulation, hésitation du corps électoral, ou Européens du Nord facétieux, cachant leur jeu ? Quoi qu'il en soit, le résultat est là.


Et ce qui est proprement stupéfiant, c'est la nature des réactions que celui-ci a suscitées.
J'ai déjà eu l'occasion d'évoquer l'étrange méfiance que provoque, chez les démocrates, l'exercice de la démocratie par le peuple (cf. "LA DEMOCRATIE OU COMMENT S'EN DEBARRASSER").
Qu'on se le dise : les Irlandais ont mal voté. Ils ont voté "non". Ils n'avaient le droit de s'exprimer qu'à la condition expresse de voter "oui". C'est sans doute une manifestation de ce que d'autres appellent, à juste titre, la "démocratie totalitaire".


Les partisans de l'Europe fédérale, une poignée d'hommes politiques et de fonctionnaires qui mènent le monde européen, dans le cadre d'une fuite en avant dont la justification tient toute rassemblée dans une espèce de slogan, vide de sens : "Il faut faire avancer la construction européenne", sans que l'on sache très bien ni en quoi consiste le fait "d'avancer", ni ce qu'il s'agit de "construire", ces tireurs de ficelles donc, ont compris qu'il est indispensable, pour "avancer", de ne pas demander leur avis aux peuples, par trop pusillanimes.
S'ils affichaient, doctrinalement, leur opposition à l'idéologie démocratique, s'ils défendaient que les plus hautes et importantes décisions politiques doivent être prises par une élite, une aristocratie, le petit groupe de ceux "qui savent", au mépris du peuple qui ne sait pas, ma foi, sur le plan de la logique, je ne trouverais rien à redire.
Mais il semble que ce qui fonde notre Europe, enfin, du moins, leur Europe, ce n'est ni une civilisation, ni une religion, ni un type d'hommes, ce sont la Démocratie et les Droits de l'Homme. Etonnant non ? Soit dit en passant, l'ensemble assez flou de pays que ce dénominateur commun permet de constituer devrait pouvoir s'enrichir de la candidature des Etats-Unis et du Canada.


Les Euro-fédéralistes ont donc encouragé la ratification par les parlements, de ce que Nicolas Sarkozy, grand géniteur du dit, appelle, sans rire, le mini-traité (300 pages tout de même, mais noircies, paraît-il, avec de petits caractères pour s'assurer que le pavé imprimé soit moins long que le texte de la défunte - mais brillamment ressuscitée -, Constitution européenne).
Las ! La Constitution, irlandaise cette fois, rédigée sans aucun doute par des démocrates non éclairés, prévoit la consultation du peuple pour l'adoption des accords internationaux. Et patatras ! Voilà le grain de sable qui s'est introduit dans la belle mécanique. En observer les effets est à la fois jubilatoire et ahurissant.


(à suivre)

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